La cession des éléments d’actifs de leur Entreprise, par les commerçants qui souhaitent faire valoir leurs droits à la retraite, représente un enjeu financier majeur. Le droit au bail commercial, actif incorporel dont la valeur peut être significative, fait l’objet d’un dispositif spécial facilitant sa cession en cas de départ à la retraite.
La cession d’un droit au bail commercial, dans le cadre de la cession d’un fonds de commerce fait l’objet d’une mesure protectrice des commerçants, visant à interdire au bailleur de s’opposer à la cession.
Cette règle étant d’ordre public, toute clause contraire stipulée dans le bail commercial doit être écartée.
A contrario, les baux des locaux commerciaux peuvent valablement interdire la cession isolée du droit au bail.
En effet, la cession du seul droit au bail commercial, c’est-à-dire indépendamment de la clientèle, ne bénéficie pas du régime protecteur applicable en cas de vente de fonds de commerce.
Ainsi, au cours de son activité professionnelle, le commerçant qui souhaite céder son droit au bail à un acquéreur qui n’exploitera pas la même clientèle devra obtenir l’accord du bailleur, en vue de sa déspécialisation.
En pratique, l’autorisation du bailleur en vue de l’exploitation d’une activité différente de celle pour laquelle il a initialement consenti la location de son bien, est le plus souvent subordonnée au versement d’une contrepartie financière.
Dans cette hypothèse c’est donc le bailleur, qui in fine, décidera du sort de la transaction envisagée.
Afin de tenir compte de la situation particulière des commerçants et pour leur permettre, le cas échéant, de faire valoir leur droit à la retraite, le législateur a prévu un cas particulier de déspécialisation forcée du bail commercial.
Il s’agit d’un mécanisme de cession libre du droit au bail commercial, dit cession – déspécialisation, prévu à l’article L145-51 du Code de commerce.
Dans le cadre de cette procédure, l’intervention du bailleur se trouve limitée et ses droits largement restreints, le commerçant pouvant lui imposer une nouvelle activité.
Ce principe d’ordre public s’oppose aux clauses contractuelles limitant le droit de cession du bail commercial.
Outre les Entrepreneurs exerçant leur activité en nom propre, la « cession-déspécialisation » bénéficie à l’associé unique d’une SARL unipersonnelle, ainsi qu’au gérant d’une SARL propriétaire de plus de la moitié du capital social depuis au moins 2 ans.
La cession-déspécialisation permet aux commerçants qui prennent leur retraite, de céder leur droit au bail à un acquéreur qui pourra exploiter toute activité compatible avec « la destination, les caractères et la situation » des locaux concernés.
La mise en œuvre du mécanisme est soumise au respect de règles de formes auxquelles le commerçant doit prêter une attention particulière.
Le commerçant doit notamment notifier au bailleur son « intention » de céder son droit au bail et préciser les conditions financières proposées en cas de cession.
Les droits du bailleur sont alors limités à un droit de préférence qu’il pourra exercer s’il entend reprendre la maitrise de la propriété commerciale de son bien, en faisant lui-même l’acquisition du droit au bail.
La cession-déspécialisation favorise la cessibilité du droit au bail pour les commerçants qui liquident leurs droits à la retraite, mais ne les décharge pas des obligations nées du bail commercial.
Elle doit donc être mise en œuvre avec précaution.
David TAVITIAN
Juriste